Il y a quelque chose que j’aime dans mon travail. Quel sadomasochiste, allez-vous me dire ! Sachez tout d’abord que ma vie privée n’engage que ma propre personne et qu’il ne s’agit pas, particulièrement du travail en lui-même. Cette petite chose, que seule la nature peut vous donner, demeure le soleil. Chaque matin, mon bureau étant bien situé, je peux le voir s’insinuer, avec majesté, au travers des structures humaines posées, audacieusement, devant lui. Ses rayons emplissent mon cœur d’une force nouvelle, d’une envie nouvelle, me donnant presque envie de pleurer de bonheur devant le spectacle offert. Je ne suis plus un homme, mais un poète en cet instant. Jusqu’à ce que les « pouets- pouets » des voitures, en train de créer un bouchon, viennent me rappeler combien les hommes, bah, c’est des cons.
Un spectacle gâché, comme d’autres peuvent être gâchés, facilement, par nous, les humains. Heureusement, par l’art, la peinture, la musique, les humains se rattrapent parfois. Avec beaucoup de talent, je tiens à le signaler (une petite pensée émue pour H.R Giger qui vient de nous quitter dernièrement). Parfois, ils le font aussi au travers des jeux vidéos, comme Deemo notamment. Les studios Ustwo (à ne pas confondre avec les studios nordiques Usky qui ont autant de chien), avec leur dernière œuvre en date, Monument Valley, vont essayer de nous faire profiter d’un spectacle que peu d’humains sont capables de reproduire. Comme des artistes.
Un Monument visuel
Inspiré par les œuvres de Maurice Cornelis Escher, artiste néerlandais du XXeme siècle, qui voyait dans ces créations aux motifs impossibles l’infini dans toute sa beauté (petit passage culturel qui vaut ce qu’il vaut), Monument Valley est une petite merveille visuelle. Une pépite, même.
Avec ses graphismes simples, sobres, mais magnifiquement dessinés, ses sprites bien animés, et ses monuments quasi vivants, tout aussi bien animés, Monument Valley est une petite claque. Il donne dans une simplicité, tellement maitrisée, tant au niveau des couleurs qu’au niveau sonore, que le jeu se transforme, dès les premières secondes en un œuvre artistique d’une grande valeur émotionnelle.
Chaque mouvement, chaque tâtonnement moite de l’écran est une invitation complète au voyage. Et à la distraction, car, un jeu se doit aussi de distraire. C’est même l’essence même d’un jeu.
Un gameplay pas en silicone (valley)
Tout aussi sobre, le gameplay a l’élégance d’une Audrey Hepburn, bien éloignée de ces nouvelles actrices siliconées qui n’ont plus rien de naturelle en dehors de leur cœur (et encore).
Vous dirigez, dans des dédales extraordinaires, Ida, une princesse, dont le but est d’atteindre les sommets des dits dédales. C’est une véritable exploration qui l’attend et il vous faudra utiliser au mieux la physique du monde vous entourant, d’un simple coup de doigt. Selon les mécanismes proposés, alternant trompe-l’œil, illusions d’optique et design improbable, la réflexion est quasi obligatoire, tout comme le sens de l’observation, ainsi que le sens pratique pour parvenir à vos fins.
Tout répond au doigt et à l’œil, vous facilitant ainsi votre parcours, et découvrant la petite histoire écrite accompagnant votre princesse paumée, qui n’attend plus que les paumes de vos mains pour s’en sortir. Intuitif, addictif, simple. Un peu trop simple ?
Entre œuvre artistique et œuvre joueuse
Monument Valley est un peu le cul entre deux chaises. Excusez-moi cette vulgarité passagère, mais l’image est parfaitement lisible. Entre œuvre artistique et œuvre joueuse, comme je l’indiquais en guise (tel le duc) de titre pour ce paragraphe.
En mettant l’accent sur la sobriété ainsi que sur l’émerveillement, les développeurs n’ont pas misé sur la difficulté, mais sur une progression naturelle. Ainsi, la frustration n’a pas lieu d’être en ces décors. Tout est lisse. Si lisse, même que, jamais ô grand jamais, vous ne vous sentirez bloqué. On aurait souhaité un peu plus d’obstacles ainsi que de piment pour que, comme toute œuvre qui se respecte, l’introspection ne se fasse pas aussi facilement.
D’une élégance et d’une poésie rare, Monument Valley mérite vraiment que l’on s’y intéresse. Gameplay, ambiance sonore, graphismes, tout forme un tout indissociable, une œuvre assez magique finalement. Disponible pour la somme de 3.59 euros, entièrement en français, il s’agit d’un bon investissement car le jeu nous pousse vers une rêverie dont nous n’éprouvons guère l’envie de sortir. Néanmoins, du fait de sa facilité, et de son manque de niveaux, il ne pourra atteindre la note maximale. Ustwo, vous deux, qui m’entendez, rajoutez quelques niveaux afin que le rêve continue, et que le prix demandé soit totalement justifié ainsi que justifiable.
- Magnifique
- Envoûtant
- Un véritable voyage
- En français
- Trop court
- Un tantinet trop facile