Parfois, le temps semble s’arrêter. Le sablier ne fait plus couler ses délicats grains d’éternité. On vous parle, mais vous n’entendez pas. Mais tout ceci est d’une normalité sans faille, puisque les dires sont aussi intéressants que de regarder un chien déféquer. On vous parle, mais vous attendez patiemment pour riposter, non pas dans l’ombre mais dans la lumière. Tout n’est qu’une question de temps. Un temps que vous maitrisez, que vous faîtes vôtre, et qui est votre allié le plus cher, en dehors de votre esprit hors norme. On vous parle, vous n’écoutez plus. Vous êtes dans la stratégie, dans l’attente. Chacun son tour. Chacun ses forces et ses faiblesses. La vôtre demeure ce moment où l’autre ne vous attend pas, et, là, avec fierté, vous sortez cette phrase cassante et inaltérable : « Pourquoi, t’es de la police ? », alors que votre collègue vous demandait simplement comment vous vous portiez en cette matinée.
Cette technique est ce que l’on appelle la stratégie au tour à tour ou dite, avec beaucoup de vérité, la stratégie qui prend son temps. Une stratégie rhétorique dans le cas évoqué, mais une stratégie qui a connu un succès certain, dans le cadre du jeu vidéo, lors de l’éclosion des premiers PCs avec la série des Heroes Of Might and Magic ou encore celle des Age Of Wonders. Une stratégie qui aurait tout à fait sa place sur le Playstore, car ne nécessitant pas une réalisation du tonnerre pour avoir de l’intérêt. Se décidant à rendre un hommage vibrant à cette époque révolue, les Studios de Game Dev Team sortirent, le 28 Mai dernier, leur propre clone des jeux de cette période avec Heroes : A Grail Quest. Mais, attention il va sans dire que l’attaque des clones n’a jamais été le meilleur Star Wars. Donc que nous réservent-ils, au final ?
Une réalisation à l’ancienne
Le clonage, dans les jeux vidéo, n’est pas un mal en soi, tant qu’il ne nous prend pas pour des moutons. Au premier lancement, le visuel pourra en rebuter certains, car le clonage est un clonage d’époque, sans ajouts particuliers tant du point de vue graphique que sonore. Bref, loin d’être un augmenté à la sauce Deus Ex.
Pourtant, malgré ses graphismes simples, ses animations minimalistes et ses bruitages d’une discrétion rare (un peu comme Etienne Daho lorsqu’il « chante »), Heroes : A Grail Quest ne manque pas de charme, ni d’atouts. Audrey Hepbrun n’était-elle pas l’une des plus belles femmes du monde (même avec les critères d’aujourd’hui) ?
L’un des avantages de cette prise de position et de cette charte graphique demeure que le jeu tourne sur n’importe quel support, et ce avec une fluidité à toute épreuve. Si cela ne marche ni sur votre smartphone, ni sur votre tablette, posez-vous une question simple, ou, devrais-je dire plutôt, accepter le constat suivant : il serait peut-être grand temps d’en changer.
Des principes à l’ancienne
Le but du jeu est simple, mais il vous est donné par l’un des grands de chez les grands : le roi Arthur himself. Rien que ça. En gros, il vous demande de faire le sale boulot et d’aller découvrir, tout seul, comme un grand garçon, le Graal. Vous voilà donc dans la peau d’un Perceval en puissance, en espérant pour vous que vous ne le fassiez point ressembler à celui de Kaamelott.
Et vous démarrez comme un simple gueux, quelques pièces en poche, et une armée qui ferait mourir de rire Sauron s’il vous voyait arriver. Vous vous déplacerez dans une carte faite de polygones, dans l’optique de trouver des obélisques (remarquez qu’ici, je ne mets pas d’astérisques) qui dévoileront petite à petit l’endroit où il vous faudra creuser pour découvrir l’artefact légendaire. Mais, la route sera longue, et jonchée d’embûches.
En effet, il vous faudra vous aguerrir et acquérir une armée digne de ce nom bien éloignée de l’armée de bouseux dont vous disposez au début. Et, pour cela, parcourir le vaste monde qui vous entoure n’est pas une option, mais une nécessité. Il vous faudra de l’argent pour enrôler quelques gens autour de vous, mais aussi trouver des artefacts dont vous pourrez équiper votre héros afin de donner des bonus à vos troupes, sans compter les parchemins magiques disposées sur votre route, au cours des combats ou bien encore lors des quêtes proposées dans les tavernes.
Les combats, parlons-en, et parlons-en en bien. Dès que vous rencontrez un intrépide adversaire ayant l’audace de s’élancer vers vous afin de vous faire mordre la poussière, vous entrez dans l’un des cœurs même du jeu, une phase des plus intéressantes : le combat au tour à tour. Sur une grille sont disposées votre armée ainsi que celle de votre ennemi, et chacun votre tour, vous utiliserez vos unités selon leurs spécificités. Chaque unité est unique en son genre. Ainsi, les connaître au mieux vous permettra d’établir une stratégie digne d’une stratégie grecque, et vous pourrez crier « RAHOU ! » devant votre victoire. Une victoire synonyme de plaisir.
Du plaisir à l’ancienne ? Non, du plaisir à l’état pur
Ainsi, le plaisir est entier, car Heroes : A Grail Quest n’a pas beaucoup de faiblesses. Si l’on ferme les yeux sur les quelques errements dit techniques (du fait de sa simplification), qui le laisse à des années lumières d’un King’s Bounty, il représente une espèce rare mais toujours vivante, à l’instar de ces fossiles vivants que sont les nautiles. Créatures étranges mais ô combien fascinantes.
Certains lui reprocheront une grosse ressemblance avec Heros Of Might and Magic, surtout le deuxième du nom. Cela est indéniable, et ce malgré des mécanismes de gameplay plus simplifiés. En revanche, du point de vue difficulté, là, on a affaire à du lourd. Le fait de perdre un combat ne vous élimine pas du jeu, mais vous fait redémarrer au tout début, au château même d’Arthur avec une armée misérable, et je vous prie de croire que, dans ces cas-là, en cas de bon avancement, le challenge est de taille. Surtout que la roue tourne, 999 jours vous seront délivrés pour accomplir votre quête. Et cela ne sera pas de trop tant la carte est grande vous faisant balader autant à pieds qu’en bateau.
On retrouve ainsi l’exigence qui a fait de ses ainés ce qu’ils sont devenus : des classiques. Pour autant, Heroes : A Grail Quest est-il au niveau ? Pas tout à fait, mais le budget développeur n’est point le même. Cela se ressent, mais n’enlève en rien sa faculté à vous faire perdre des heures de jeux, dans le bon sens du terme. On commence une partie en se disant : « Dans 30 minutes, j’arrête », et l’on se retrouve 2 heures plus tard, les yeux un peu cernés, continuant à jouer. Le temps n’est plus du temps perdu, mais du plaisir. Du plaisir en barre. Comme une bonne plaque de chocolat.
Pour 0.75 euros (c’est à dire même pas le prix du bois servant à confectionner une dague), sans la moindre publicité, sans la moindre petite boutique en ligne, Heroes : A Grail Quest remonte aux racines mêmes d’un genre difficilement assimilable par les développeurs du fait de la recherche permanente d’un équilibre certain en terme de gameplay. Et, là où, parfois, certains échouent, Game Dev Team réussit pour notre plus grand bonheur. Bien entendu, le jeu n’est pas parfait. On pourra lui reprocher une réalisation certes propre mais simple. Néanmoins, il possède la même faculté que ses ancêtres : celle de faire couler le sablier du temps sans que ce dernier ne soit préjudiciable. Et cela, même si le temps, c’est de l’argent, n’a pas de prix.
- Système de combats intéressant
- Pas gourmand du tout
- Challenge de taille
- Très prenant
- Mises à jour régulières
- Une seule carte
- Réalisation un peu simple
C’est mignon tout plein ce jeu la, j’m’en vais l’essayer !
Tu peux y aller si tu aimes le genre ;=)
Tiens, tu nous diras ce que tu en penses :p
c’est vraiment impressionnant la sobriété du jeu fait penser vraiment a du héros cool 🙂